Juste la fin du monde

Juste la fin du monde

Journée d'études octobre 2017 (1/2)

"Juste la fin du monde" de Jean Luc Lagarce : des premiers brouillons à l'adaptation cinématographique"

Cette journée s'est déroulée le 7 octobre 2017 au CDN Besançon Franche-Comté, en partenariat avec l'Université de Bourgogne Franche-Comté

A l'occasion de la sortie du film de Xavier Dolan, Juste la fin du monde, présenté en compétition au 69e festival de Cannes et dans les salles en septembre 2016, la MSHE Ledoux et le laboratoire ELLIADD organisent une journée d'études centrée sur la génétique de cette œuvre, depuis les premiers brouillons jusqu'à son adaptation cinématographique.

Alina Kornienko - Juste la fin du mot : l’hybridité de la parole déconstruite au théâtre de J.-L. Lagarce.

Malgré toute leur simplicité semblable, les pièces de Jean-Luc Lagarce sont très travaillées d’un point de vue dramatique ainsi que poétique. La conceptualisation de chaque texte est effectuée dans le Journal et est suivie de multiples rédactions qui aident à voir l’élaboration du style auctorial exceptionnel qui inscrit et imite la poétique unique propre à son époque contemporaine. Il existe donc un lien indissoluble, une transcendance et une intertextualité entre tous les textes de Lagarce qui fait naître une hybridité à l’œuvre, sujettaire, générique, poétique et artistique. Dans son Journal ainsi que dans ses textes courts Lagarce a dévoilé son mode de création littéraire dont il serait intéressant de retracer le fonctionnement dans la perspective rédactionnelle de Juste la fin du monde. Car toutes les versions de la pièce incarnent la quête auctoriale d’un mot juste ce qui fait écho avec la recherche infinie du mot ainsi qu’avec la recherche de soi et de sa réponse par le mot lui-même qui forment le logo-drame mise en scène par Lagarce et vécu par ses personnages dramatiques.
Un sujet hybride – la croisée d’un nombre de textes de Lagarce ce qui en fait à la fois un étape créateur et une œuvre indépendante liant une réactualisation d’un paradigme archétypal avec des sujets-tabous contemporains – est exposé en langage hybride qui se (dé)construit et se parodie. Car l’événement-créateur s’incarne, au sein de la dramaturgie de Jean-Luc Lagarce, en acte de parole. Juste la fin du monde devient ainsi un drame communicatif d’un tout dernier mot qui ne sera jamais lancé. Il serait, par conséquent, important d’étudier le processus de création, les mécanismes poétiques et dramatiques de cette écriture hybride de Jean-Luc Lagarce ainsi que le statut d’un mot dans le cadre de théâtre du langage prenant pour exemple une de ses pièces emblématiques depuis son synopsis et jusqu’à sa rédaction finale.

Alina Kornienko

Alexis Leprince – Genèse de l’intermède de "Juste la fin du monde".

Lorsque l’on se penche sur les brouillons conservés de Juste la fin du monde, on se rend compte que la séquence qui a le plus évolué, qui connait le plus de variations, de modifications de détails comme de réagencements de structure, c’est l’intermède, d’abord intégré à la première partie, puis séparé de cette première partie, et progressivement enrichi, amplifié. Etudier le processus d’écriture de l’intermède de Juste la fin du monde permet d’observer un moment d’interrogation mais surtout de revirement, de bascule, dans l’écriture, ouvrant la pièce à une autre dimension.

Alexis Leprince

Pierre Chambefort - Adieu au récit ( ? ) Des Adieux à Juste la Fin du monde, pertinence d'une réflexion sur la poétique ?

« Ne plus écrire qu'ici ? Après Les Adieux, Juste la fin du monde et ce Journal vidéo, comme autant de fins. » (Journal, vendredi 01er février 1991)

Trois supports. Trois genres. Trois voies pour un même thème – celui du retour du fils – qui aurait hanté l'écriture de Lagarce depuis Retour à la citadelle. De ce motif – ou poncif – il faudrait rapprocher celui de la parole paradoxalement contrainte, de l'impossibilité de dire et de la maîtrise de la langue dont témoignerait chez Lagarce l'écriture de la variation. Réfléchir à la genèse de Juste la fin du monde devrait de fait me permettre d 'analyser la place centrale du travail de la langue dans le théâtre de Lagarce ; la tension dramatique étant peut-être avant tout ici tension de l'écriture dialogique. Il me semble donc pertinent d'interroger les parallèles et les contradictions possibles entre forme narrative et forme théâtrale tels que peut les faire apparaître une comparaison entre Les Adieux et Juste la fin du monde afin de déterminer quelles variations énonciatives (et pragmatiques) amène le passage d'un genre à l' autre. Il s'agirait donc de comprendre comment, du journal à la scène en passant par le récit, du jeu se crée à partir du « je ».

Pierre Chambefort