Présentation
Né à Paris le 12 septembre 1966, Stanislas Nordey s’impose comme l’une des figures majeures du théâtre public français. Fils de l’actrice Véronique Nordey et du réalisateur Jean-Pierre Mocky, il grandit dans un environnement artistique intense, qui nourrit très tôt son rapport à la parole et à la scène. Cette filiation, à la fois inspirante et exigeante, l’amène très jeune à chercher sa propre voie dans un théâtre où se conjuguent radicalité esthétique et engagement profond.
Après des études d’histoire, il rejoint le Conservatoire national supérieur d’art dramatique, où il affirme un rapport singulier à la langue, conçu comme une matière physique et vivante. En 1987, il met en scène La Dispute de Marivaux, spectacle fondateur qui révèle une approche frontale du texte et un goût prononcé pour la parole adressée. L’année suivante, il fonde sa compagnie avec sa mère, posant les bases d’une recherche personnelle ancrée dans les écritures contemporaines. Très tôt, il choisit de monter des auteurs encore peu représentés en France, tels que Pier Paolo Pasolini ou Werner Schwab, affirmant une esthétique politique et poétique fondée sur l’exigence.
De 1994 à 1997, il est artiste associé au Théâtre Nanterre-Amandiers, à l’invitation de Jean-Pierre Vincent. Cette période marque un tournant dans son parcours, caractérisé par des spectacles où l’acteur, le texte et l’adresse au public composent un triptyque dramaturgique central. En janvier 1998, il prend avec Valérie Lang la codirection du Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis (TGP), Centre dramatique national. Leur mandat, qui s’achève en 2001, se distingue par un engagement résolu en faveur des écritures d’aujourd’hui, d’un public élargi et d’une vision politique du théâtre public.
En 2014, Stanislas Nordey est nommé à la tête du Théâtre National de Strasbourg (TNS). Sa direction marque un moment important dans l’histoire de l’institution : il y associe étroitement l’École du TNS et développe une programmation tournée vers les écritures du présent, les formes hybrides et les auteurs émergents. Le TNS sous sa direction devient un espace où se croisent création, transmission et réflexion, en cohérence avec sa conception d’un théâtre comme lieu d’émancipation et de pensée critique.
L’esthétique de Nordey repose sur une conviction profonde : la langue est au cœur du théâtre. Le texte y est souffle, tension et rythme, et l’acteur, placé frontalement, porte une parole qui interroge autant qu’elle engage. Cette approche, exigeante mais accessible, fait dialoguer théâtre, performance et musique, et l’amène régulièrement vers l’opéra et des formes scéniques transversales. Sa fidélité aux auteurs contemporains —Pasolini, Jean-Luc Lagarce, Martin Crimp, Laurent Gaudé ou Wajdi Mouawad — constitue une ligne directrice de son travail, où il cherche à faire entendre les voix du présent.
Son influence se mesure aussi à son engagement dans la transmission : enseignant, pédagogue, animateur d’ateliers, il accompagne de nombreux artistes et défend l’idée d’un théâtre public comme espace d’apprentissage et de partage. Sa démarche et son parcours ont donné lieu à plusieurs études, dont Stanislas Nordey : locataire de la parole, publié en 2013. Un deuxième volume de Locataire de la parole a été publié en 2025, poursuivant l’analyse de son esthétique, de son rapport au plateau et de son engagement artistique, notamment durant ses années au TNS.
Aujourd’hui, Stanislas Nordey demeure une figure essentielle du paysage théâtral : un créateur pour qui la scène est avant tout un espace d’adresse, d’écoute, d’expérimentation et de renouvellement permanent du lien entre texte, corps et société.