L'Abus
Présentation
Alors tu vois‚ pour le zizi la vérité‚ là‚ il faut la dire. Après la tache. L'attouchement. Le plus affreux les torgnoles c'est pas ; c'est pas ces mains d'adulte sur tes cuisses ; c'est pas tes mains derrière ton dos quand il te dit que tu es puni‚ que tu baisses la tête‚ les yeux aussi‚ que tu sais pas ce qui t'arrive‚ que tu sais pas si c'est juste ou si c'est faux‚ que tu sais pas si aux autres petits garçons aussi on leur a déjà fait‚ là‚ ce truc‚ des claques‚ du zizi‚ de la punition‚ que si c'est normal‚ que c'est ça la vie‚ et que si c'est ça la vie‚ alors tu pleures quand même‚ que la morve elle te coule du nez‚ que tu la renifles‚ que là‚ cet adulte‚ il te dit de ne pas pleurer‚ qu'il te reprend dans ses bras‚ qu'il te la remonte ta chemisette‚ qu'il te le colle son gros truc sur le ventre‚ qu'il te caresse‚ te mouche‚ te mouille avec des petits baisers après qu'il t'ait bien battu‚ qu'il te dit : attends‚ attends tu vas voir ! petit sale "‚ qu'il te respire très fort dans l'oreille‚ qu'il recommence à te pincer‚ qu'il t'appelle " mon petit‚ mon petit ".
La presse
Des lambeaux de phrases pour en finir avec la chair.
Ce qui est déroutant dans ce monologue, c’est la collision entre un récit très intime et une vision à vif du monde. La mise à nu plonge à l’intérieur même des tripes. Ainsi, dans une séquence, l’écrivain place son narrateur dans le ventre de sa mère, demandant à son père de se retirer pour ne pas devoir venir au monde.
Laurence Cazaux - Le Matricule des Anges n° 39, juin 2002